Le baratin du lundi 11 juin 2012
Rien de tel pour redynamiser son couple que de vivre à 300 kilomètres l'un de l'autre. La semaine a passé sans anicroches et Léon-le-garçon a réintégré le caravensérail conjugal vendredi soir avec sa Samsonite élimée et son duvet à laver en déclamant :
Vous m'avez manqué !
Une boite de Rennie pour désintégrer le noyau de colère qui continuait à bouillonner en moi et j'étais tout ouie pour écouter ses aventures extravagantes, les ponctuer d'onomatopées retentissantes et poser quelques questions intelligentes.
La femme parfaite.
Jusqu'à ce que Léon, dans un élan d'enthousiasme, nous intime l'ordre de nous asseoir dans le canapé usé pour visionner le-film-sur-la-société-où-Papa-travaille-maintenant et dans lequel, en bon zèbre qui se respecte, je n'ai vu que sympathique propagande.
Tout à sa joie d'être l'un des nouveaux maillons de cette chaîne fantastique et immergé dans le tout-nouveau-tout-beau, Léon ne s'aperçut pas un instant de la portée de la phrase qu'il allait me coller dans le dentier :
Tu vois, j'ai bien fait d'y aller.
Là, mes deux hémisphères se sont téléscopés et j'ai marqué un temps d'arrêt.
Pourquoi diantre avais-je été assez cruche pour ne pas, moi aussi, chercher un job faramineux à plusieurs centaines de bornes de chez moi, en 2006, 2007, 2008, 2009, 2010, 2011 et 2012, tout en jurant à Miss Cocotine et à son père que c'était vraiment trop dur, de vivre sans eux ?
Avant même que je ne trouve une réponse décente à cette question fumante, Léon est reparti avec son nouveau chameau.
Le plexus en lambeaux, j'ai repris le chemin de ma collectivité à deux balles où depuis que le psychopathe qui loge dans mon bureau m'a aboyé toute sa haine, j'entrevois enfin que ce concours est sans doute une erreur d'aiguillage et que, s'il est question de moisir d'ennui avec des crétins pareils, autant me laisser mourir tranquillement dans l'étroitesse de ma-panoplie-fripée-de-MAF-totalement-dévouée-à-Léon-et-à-ses-ambitions.
Y'a pas un proverbe arabe qui dit : Dans la peine, ne demandez pas conseil à celui qui est heureux ?
Surtout s'il court de l'Ibis de Massy-Palaiseau à celui de Strasbourg.
Moi aussi, ce soir, j'ai comme-qui-dirait une envie d'évasion. Justement, la Lufthansa, que je n'ai pas sonnée d'ailleurs - pas plus que tous ceux qui viennent par dizaines polluer ma boite mails - m'informe que je n'ai " Plus que 2 jours pour des places supplémentaires à destination de Berlin à 49 euros*".
Berlin, ça me changerait du bled, non ?