Ne pouvant décemment pas m'en remettre au seul Muscadet pour calmer mes neurones désorientés, j'ai pris la sage décision de traverser cette 39ème semaine de 2010 sous camisole homéopathique.
Seule une bonne cure de Sédatif PC pouvait m'aider à absorber les news effrayantes, les pub abracadabrantes et les campagnes de com' étonnantes auxquelles nous sommes tous plus ou moins exposés chaque jour.
C'est ainsi que cahin-caha, j'ai vécu quelques jours paisibles et heureux en fermant les yeux sur tout ou presque...
...sur ces élucubrations tendances vantant les bienfaits d'une mobilité écocitoyenne à base de marche à pied-bus-vélo-tram et tendant à faire passer le pauvre consommateur de périph' pour un sombre ringard détestant la planète.
Si j'avais soulevé la paupière ne serait-ce qu'un instant, j'aurais bien pu me mettre à marmonner que dans l'univers feutré et si convivial de mon Pôle Emploi du double-four, il était de bon ton de posséder quatre roues au risque de se voir catalogué de mauvais-élément-pas-apte-à-se-déplacer-et-si-c'est-comme-ça-y'a-qu'à-le-radier et que pour parcourir les 60 km quotidiens me reliant à mon unique contrat de travail en sept ans, je n'avais guère le choix de jouer à la jolie bobo qui frétille du popotin sur son vélo hollandais, ni même de m'esbaudir devant la qualité exceptionnelle du réseau nantais qui n'est pas capable de me proposer autre chose, pour couvrir la distance, qu'une sorte de voyage initiatique pedibus-bus-pedibus-tram-pedibus-tram-pedibus-bus-pedibus d'1h38 deux fois par jour.
...sur le témoignage effarant de cet ingénieur démoli par son employeur manipulateur qui dressait de jolies bandes de tortionnaires pour expliquer aux désignés comme faibles comment (tré)passer d'un point à l'autre d'une magnifique courbe de deuil figurant, paraît-il, dans tous les bons bouquins de management.
Si j'avais soulevé la paupière ne serait-ce qu'un instant, j'aurais bien pu me mettre à vomir tellement l'homme peut tomber bas dans ce monde sans pitié du business et pleurnicher à nouveau sur mon sort de salariée plusieurs fois brimée, méprisée, piétinée et expédiée par de gentils petits chefs devenus, par la volonté d'une direction toute puissante ciblant l'élimination, de véritables monstres assoiffés de sang.
...sur le nombre à trois chiffres figurant en bas à droite de ma première feuille de paie depuis 2003, dûment récupérée le 28 septembre, jour à marquer d'une croix rouge sur le calendrier.
Si j'avais soulevé la paupière ne serait-ce qu'un instant, j'aurais bien pu me mettre à rire de mes velléités d'indépendance et me dire que décidément, si l'homme ne m'entretenait pas de manière outrageuse, je n'aurais plus qu'à faire mon paquetage et remonter chez moi, à Paris, où les ponts ont tout de même une autre gueule qu'à Nantes.
...sur une Miss Cocotine qui à la question mais-qu'est-ce-que-tu-préfères-comme-Playmob' me répond, tout excitée, la police.
Si j'avais soulevé la paupière ne serait-ce qu'un instant, j'aurais bien pu me lancer dans de grandes respirations abdominales en me disant qu'après tout, ce penchant pour l'uniforme pourrait lui valoir d'être taxée de bonne française, un atout non négligeable par les temps qui courent.
J'ai réussi à faire l'aveugle comme ça jusqu'à dimanche soir et puis, l'annonce du programme de Guy Lagache "Argent, impôts, retraite, qu'est-ce-qui va changer pour vous ?" m'a fait virer en mouche aimantée par un ruban collant et j'ai fauté. Au doux son de la voix de notre-premier-ministre-mais-plus-pour-longtemps, j'ai repris du service pour me délecter de ce moment d'exception, les mirettes en alerte.
Bonne semaine à tous !