Chronique d'une mort annoncée, épisode number twenty seven
Ce matin, je me tâte pour alerter l'inspection du travail du double four.
L'homme m'est tombée sur le poil - et faut bien avouer que l'expression coule de source quand on s'attarde un peu trop sur mes mollets de carreleuse - hier soir à 20h05 précises :
"Allez, t'es prête ? On y va."
J'étais alors en train de m'assurer que Miss Cocotine ne brossait pas qu'une dent sur deux, tout en gratounant la cocotte. Ce qui relève de l'exploit le plus phénoménal quand on n'a qu'un seul bac en inox.
Accessoirement, j'avais ma journée dans les pattes et personne ne peut contester le dévouement extrême dont j'avais fait preuve le matin même en me trimballant de chez Brico-Dépôt à Casto.
Et la cerise sur le gâteau, c'était que, poussée par l'homme me répétant "Vas-y, t'as rien à perdre !" et par ma copine Odile qui souhaitait "me diffuser des ions ravageurs", je cite, j'en étais arrivée à la conclusion qu'il fallait effectivement tenter le tout pour le tout. A mon consultant préféré, celui dont l'assistante se prend pour une armure médiévale, je pondis une bafouille bien tournicotée, histoire de faire l'article, une seconde fois, de mes compétences inégalables.
Fallait croire que mon bel effort ne serait pas récompensé. A 19h30, le type n'avait toujours pas daigné me convoquer pour signer le contrat.
Résultat des courses : le premier qui aurait l'audace de se frotter à la Cocotine enragée, allait forcément s'y piquer.
Mais manifestement, l'homme se tapait autant le coquillard de mes échecs de communication que de l'état de mes cernes. Seul son chantier importait.
Pendant que j'essayais de convaincre Miss Cocotine de rester allongée et que, pour bien me mettre la rate au court-bouillon, elle négociait une troisième histoire, l'homme, penché sur sa carrelette avec l'objectif de boucler le débat le soir même me réclamait à corps et à cris, et tant pis si je ratais mon-PDPA-au-moment-où-il-serait-donné-en-pâture-à-onze-gueux-voraces-mais-néanmoins-bien-élevés.
Ca frisait le harcèlement moral.
Grâce à Dieu et surtout à notre mental de feu, il ne restait plus que quelques rangs à se colleter. La tâche fût exécutée en silence et l'opération rondement menée.
Gentleman, l'homme me laissa même conclure et immortalisa l'instant sans songer que ça pourrait constituer un début de preuve pour le dossier que je m'apprêtais à soumettre aux Prud'Hommes pour heures de nuit non rémunérées.
A 21h15, l'affaire était faite et c'est donc en grandes pompes que je peux ce midi vous annoncer la nouvelle...
LE DERNIER CARREAU A ETE COLLE HIER SOIR
Alors, des vocations ?