No surrender
J'ai clôturé cette semaine number 43 de l'an 2010 toute guillerette.
Ca va vous épater, je vais mieux.
J'imagine quelques langues fourchues qui, bien abritées derrière leurs écrans, parieront que j'ai succombé à la tentation des boules-de-gomme-qui-font-voir-la-vie-en-rose-fuschia prescrites par mon toubib bien-aimé.
Même pas.
Que du bio.
MES endorphines A MOI produites par MON hypothalamus A MOI.
Je suppose qu'immédiatement, cette question vous titille : "Mais comment elle fait, pour aller bien, alors que la crise en encore en plein boom. Elle bluffe."
Vous n'y êtes pas.
J'ai juste dit NON.
Figurez-vous que fin septembre, alors que je me morfondais dans un bureau sans saveurs, j'ai envoyé ma candidature sur deux postes, l'un qui me plaisait et l'autre, pas du tout. Allez savoir pourquoi, un instant d'abnégation sans doute.
Une chance insolente. J'ai été convoquée en entretien pour le deuxième.
J'ai somatisé à n'en plus finir et puis, le jour J arrivant, j'ai décidé bravement d'affronter mon destin. C'était le 12 octobre, jour de grève, à 11h pétantes.
De ce face-à-face avec ce que la FPT nomme un jury, j'ai émergé avec une boule au ventre. Certes, le job me rebutait mais le type avec qui j'allais pouvoir désormais partager mes journées avait l'air fort sympathique et des supérieurs sains d'esprit, force était de constater qu'à ce jour, je n'en avais pas croisés foultitude.
En bonne balance, je suis restée là, à osciller entre l'attrait de faire une fin en me casant sagement et l'ambition débile d'avoir un jour un boulot qui me plaise pour finalement parvenir à cette conclusion :
La bonne question à se poser, ne serait-ce pas au fond "Est-ce tu t'imagines vraiment passer les 20 ans à venir dans ce type de job ?"
C'est comme ça que, morte de trouille, j'ai dit NON.
S'en est suivie une période de culpabilité intense alimentée par quelques esprits sadiques conjuguant parfaitement le conditionnel, tendance parent normatif, qui aurait bien pu me flanquer à terre. Après tout, c'était vrai. Quel culot j'avais. Refuser du travail, à l'heure actuelle. Un coup à être blacklistée par mon PDPA-bien-aimé et ses soldats de Pôle Emploi.
Et pour couronner le tout, mon ex-futur-directeur m'a téléphoné en début de semaine pour insister si gentiment que ça m'a pété le tensiomètre.
Rendez-vous compte. En quelque sorte, je me faisais chassée. Une première.
Trois jours pour changer d'avis. Sans doute les pires de 2010 pour mon estomac.
Un dialogue intérieur incessant ne m'a lâchée qu'entre deux insomnies : non-mais-attends-t'as-trouvé-un-boulot-pauvre-cruche, ouais-mais-c'est-pas-du-tout-ce-que-je-veux-faire-et-pourtant-je-ne-mets-même-pas-la-barre-haut-maintenant, non-mais-attends-tu-trouveras-jamais-rien-d'autre-tu-vas-te-griller, ouais-mais-c'est-pas-une-raison-pour-faire-n'importe-quoi-faut-que-je-garde-ma-ligne-de-conduite, non-mais-attends-il-a-l'air-bien-sous-tous-rapports-ce-gars-là, ouais-mais-je-vais-crever-à-petit-feu-là-dedans, non-mais-attends-tu-vas-pouvoir-évoluer-c'est écrit-dans-le-livre-saint-de-la-FPT-ça, ouais-mais-je-suis-lucide-l'étiquette-collée-dans-le-dos-je-l'ai-pour-un-bail, non-mais-attends-tu-t'en-moques-c'est-la-titularisation-assurée-dans-un-an, ouais-mais-j'aurai-rendu-l'âme-avant-l'échéance, ... non-mais-attends-c'est-un-salaire-qui-tombe.
Un salaire. Au fait, c'était vrai, je n'avais même pas abordé le sujet à l'entretien. Trop de bonnes nouvelles en même temps, j'avais sans doute craint l'overdose.
1200 € nets par mois.
Un pont d'or pour une pauvre fille comme moi, trop ci et pas assez ça aux yeux des employeurs du privé.
J'ai médité longuement sur ce qui pourrait bien être le prochain sujet de philo "Se résigner, c'est comme prendre 10 ans d'un coup, non ?" et la queue entre les jambes, j'ai fini par expédier un mail pour dire NON, pariant avec infiniment d'audace sur ma bonne fortune et conservant l'espoir de dégoter un travail qui ne me donne pas envie de recourir derechef à la prescription sus-mentionnée.
Signes que je garde malgré tout une certaine fraîcheur. Ou que je suis parfaitement inconsciente.
Pour digérer l'affaire et ne pas virer maboule, j'ai épousseté ma MAC et nourri l'idée que j'avais derrière la tête.
L'avenir me dira si j'ai eu raison ou tort.
Après tout, la vie n'est-elle pas trop courte pour abdiquer ?
Bonne semaine à tous !