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Le petit monde de Cocotine
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job wanted
24 novembre 2010

Noir sur blanc

Lundi, d'humeur boudeuse, je me suis adonnée à l'un de mes plaisirs favoris qui est d'aller fureter à la bibliothèque. C'est comme ça que j'ai posé la main sur ce livre.

confessions

Une insomnie m'a permis de me plonger au coeur d'un univers que je connais très bien pour en avoir été souvent LA CLIENTE.

5 ans et demi que j'ai déboulé dans le double four non par envie mais par obligation, pour suivre l'homme qui, lui-même, cherchait à se refaire après deux licenciements très rapprochés dans le temps mais très éloignés géographiquement.

Amnésique par instinct de survie, j'ai persisté à croire en ma bonne étoile et multiplié les actions douces et les opérations commando. Je me suis battue envers et contre tout. Contre des systèmes bien verrouillés, des réseaux très protégés, des portes blindées, des humains robotisés vissés dans leurs privilèges.

En échange, je n'ai récolté que mépris, humiliations et brimades.

Au fil des années, plutôt docile, j'ai tout tenté jusqu'au coaching bidon dont on peut se demander s'il n'aurait pas pour seule vertu que de remplir les poches de ceux qui profitent à fond du secteur pseudo-formations-et-bilans-de-compétences-qui-flattent-juste-l'ego.

Ma conseillère ANPE était devenue une sorte de rendez-vous indispensable tout simplement parce que personne d'autre qu'elle ne m'écoutait et que ces échanges rapides et sans saveur m'imposaient un rythme qui me permettait de tenir le coup.

Pourtant, elle m'en faisait baver. "Vous devriez changer de secteur. Vous allez vous épuiser. Vous devriez faire de la soudure."

J'en sortais ratatinée comme une vieille pomme avec la tentation de l'envoyer au diable, de briser ce lien ridicule et infructueux. Après tout, je ne percevais pas un centime d'indemnisation et son regard désespéré prouvait à quel point elle doutait de son utilité.

Son but ultime, je le discernais bien, c'était de me RADIER. Cataloguée chômeuse de très longue durée, je représentais son cauchemar absolu. En pauvre marionnette, elle n'avait guère le choix.

Et cette fusion en prévision, je sentais à quel point ça la déstabilisait.

A certains moments, on ne savait plus qui d'elle ou de moi devait être le plus réconfortée et aidée. Alors on désamorçait en plaisantant et déblatérant tout doucement.

Ni elle ni moi n'étions dupes.

Assurément, il fallait lutter et ne pas lui faire ce plaisir, à celui qui commanditait tout ça. Abdiquer et disparaître des listes, c'était lui servir de jolies statistiques sur un plateau doré.

J'ai lutté.

Un temps.

Et puis, petit à petit, l'éventualité que je n'arrive jamais à retrouver un poste s'est ancrée en moi et j'ai lâché prise.

J'ai disparu, comme il l'avait souhaité.

Je fais partie des milliers de demandeurs d'emploi bien réels mais évincés du système. Ca fait belle lurette que je m'en doutais mais cette nuit, je l'ai vu écrit noir sur blanc.

2010 touche à sa fin et l'heure des bilans va sonner.

Un salaire mensuel comme salaire annuel, et relativement minable, qui plus est. Pathétique.

Je n'ai plus une once d'énergie. Comme-qui-dirait, il m'a tuée.

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1 novembre 2010

No surrender

J'ai clôturé cette semaine number 43 de l'an 2010 toute guillerette.

Ca va vous épater, je vais mieux.

J'imagine quelques langues fourchues qui, bien abritées derrière leurs écrans, parieront que j'ai succombé à la tentation des boules-de-gomme-qui-font-voir-la-vie-en-rose-fuschia prescrites par mon toubib bien-aimé.

Même pas.

Que du bio.

MES endorphines A MOI produites par MON hypothalamus A MOI.

Je suppose qu'immédiatement, cette question vous titille : "Mais comment elle fait, pour aller bien, alors que la crise en encore en plein boom. Elle bluffe."

Vous n'y êtes pas.

J'ai juste dit NON.

Figurez-vous que fin septembre, alors que je me morfondais dans un bureau sans saveurs, j'ai envoyé ma candidature sur deux postes, l'un qui me plaisait et l'autre, pas du tout. Allez savoir pourquoi, un instant d'abnégation sans doute.

Une chance insolente. J'ai été convoquée en entretien pour le deuxième.

J'ai somatisé à n'en plus finir et puis, le jour J arrivant,  j'ai décidé bravement d'affronter mon destin. C'était le 12 octobre, jour de grève, à 11h pétantes.

De ce face-à-face avec ce que la FPT nomme un jury, j'ai émergé avec une boule au ventre. Certes, le job me rebutait mais le type avec qui j'allais pouvoir désormais partager mes journées avait l'air fort sympathique et des supérieurs sains d'esprit, force était de constater qu'à ce jour, je n'en avais pas croisés foultitude.

En bonne balance, je suis restée là, à osciller entre l'attrait de faire une fin en me casant sagement et l'ambition débile d'avoir un jour un boulot qui me plaise pour finalement parvenir à cette conclusion :

La bonne question à se poser, ne serait-ce pas au fond "Est-ce tu t'imagines vraiment passer les 20 ans à venir dans ce type de job ?"

C'est comme ça que, morte de trouille, j'ai dit NON.

S'en est suivie une période de culpabilité intense alimentée par quelques esprits sadiques conjuguant parfaitement le conditionnel, tendance parent normatif, qui aurait bien pu me flanquer à terre. Après tout, c'était vrai. Quel culot j'avais. Refuser du travail, à l'heure actuelle. Un coup à être blacklistée par mon PDPA-bien-aimé et ses soldats de Pôle Emploi.

Et pour couronner le tout, mon ex-futur-directeur m'a téléphoné en début de semaine pour insister si gentiment que ça m'a pété le tensiomètre.

Rendez-vous compte. En quelque sorte, je me faisais chassée. Une première.

Trois jours pour changer d'avis. Sans doute les pires de 2010 pour mon estomac.

Un dialogue intérieur incessant ne m'a lâchée qu'entre deux insomnies : non-mais-attends-t'as-trouvé-un-boulot-pauvre-cruche, ouais-mais-c'est-pas-du-tout-ce-que-je-veux-faire-et-pourtant-je-ne-mets-même-pas-la-barre-haut-maintenant, non-mais-attends-tu-trouveras-jamais-rien-d'autre-tu-vas-te-griller, ouais-mais-c'est-pas-une-raison-pour-faire-n'importe-quoi-faut-que-je-garde-ma-ligne-de-conduite, non-mais-attends-il-a-l'air-bien-sous-tous-rapports-ce-gars-là, ouais-mais-je-vais-crever-à-petit-feu-là-dedans, non-mais-attends-tu-vas-pouvoir-évoluer-c'est écrit-dans-le-livre-saint-de-la-FPT-ça, ouais-mais-je-suis-lucide-l'étiquette-collée-dans-le-dos-je-l'ai-pour-un-bail, non-mais-attends-tu-t'en-moques-c'est-la-titularisation-assurée-dans-un-an, ouais-mais-j'aurai-rendu-l'âme-avant-l'échéance, ... non-mais-attends-c'est-un-salaire-qui-tombe.

Un salaire. Au fait, c'était vrai, je n'avais même pas abordé le sujet à l'entretien. Trop de bonnes nouvelles en même temps, j'avais sans doute craint l'overdose.

1200 € nets par mois.

Un pont d'or pour une pauvre fille comme moi, trop ci et pas assez ça aux yeux des employeurs du privé.

J'ai médité longuement sur ce qui pourrait bien être le prochain sujet de philo "Se résigner, c'est comme prendre 10 ans d'un coup, non ?" et la queue entre les jambes, j'ai fini par expédier un mail pour dire NON, pariant avec infiniment d'audace sur ma bonne fortune et conservant l'espoir de dégoter un travail qui ne me donne pas envie de recourir derechef à la prescription sus-mentionnée.

Signes que je garde malgré tout une certaine fraîcheur. Ou que je suis parfaitement inconsciente.

Pour digérer l'affaire et ne pas virer maboule, j'ai épousseté ma MAC et nourri l'idée que j'avais derrière la tête.

L'avenir me dira si j'ai eu raison ou tort.

Après tout, la vie n'est-elle pas trop courte pour abdiquer ?

Bonne semaine à tous !

7 octobre 2010

Libérée

Certaines langues fourchues pourront toujours ergoter. Ce n'est même pas pour assurer mes arrières qu'hier matin, j'ai déballé la farandole des desserts - gentiment livrée par l'homme - à la cafét' du boulot, mais tout simplement pour dire merci à cette équipe qui m'a accueillie avec le sourire, m'a regardée comme un être humain et appelée de suite par mon prénom. De petits détails qui n'en sont pas. Pour avoir vécu trois semaines fin 2008 auprès d'une poignée de pestes puantes qui soit m'ignoraient purement et simplement, soit m'étiquetaient d'un "la stagiaire" méprisant, je sais la valeur d'un regard bienveillant.

Pourtant, il était temps que ça cesse. Après avoir échoué aux archives, j'ai bien failli prendre racine à la photocopieuse avant de conclure en beauté sur la conception d'étiquettes de chevalets. 

Hier à 16h30 précises, la fée poubelles que j'étais devenue grâce aux bons soins de mes preux collègues a rendu sa baguette magique et son chapeau pointu en s'accordant le droit de faire un voeu, elle aussi :

BON SANG DE BOIS,

FEE DU CDI PARFAIT,

FAITES QUE JE TROUVE ENFIN

UN BOULOT QUI ME DONNE ENVIE

DE RESTER CLOITREE DANS UN BUREAU

PLUS DE QUINZE JOURS.

Après tout, cette odieuse magicienne du service job épanouissant pouvait bien se remuer un peu les fesses. A croire qu'elle était absolument débordée, celle-là aussi, pour ne même pas remarquer dans quel désarroi j'étais agglutinée et les vingt bonnes années qu'il me restait à tirer avant de comptabiliser minutieusement mes points ARRCO-AGIRC.

Ce matin, l'homme a repris ses habitudes et, la fleur aux dents, s'en est allé. J'ai retrouvé les cris de la cour de récré, les oeufs du marché, les ruelles désertées, les bateaux penchés, la liberté de flâner, les pauses thé.

Et mes pensées emberlificotées.

Envie de rire et de chialer.

Est-il possible que de discuter le bout de gras pendant des heures avec un usager pour déterminer s'il fallait lui livrer un 180 ou un 240 litres m'ait à ce point donné l'impression d'exister ?

C'est souvent comme ça, les fins de CDD.

Et même pas de prime de précarité à claquer.

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13 septembre 2010

Lessivée mais titularisée... ou presque

Depuis six jours, je n'avais eu à prêter l'oreille qu'à des usagers conciliants et parfois même amusants.

Ma collègue qui trouvait certainement que je faisais un peu trop ma maligne en déclarant, conquise, mais-ils-sont-tous-gentils, s'était contentée de me lancer un regard perplexe signifiant probablement t'as-rien-vu-godiche-attends-un-peu.

C'est au terme de cette longue journée de doléances que j'ai pu enfin comprendre à quoi ressemblait l'administré acariâtre et volontairement blessant contre lequel certaines bonnes âmes m'avaient mise en garde.

A 16h14, en ce lundi 13 septembre 2010, je me suis fait, pour la première fois de ma vie, traitée de

SALE FONCTIONNAIRE.

Magnanime, j'ai évité de décevoir le coco en lui exposant mes états de service au plus profond du privé et en lui dévoilant la teneur de mon contrat d'auxiliaire précaire. Ca l'aurait tué.

J'ai plié bagages lessivée en me disant que somme toute, j'étais comme-qui-dirait TITULARISEE !

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Illustration Gil Elvgren

10 septembre 2010

Premières impressions

Le type qui m'avait recrutée ne m'avait laissé aucun espoir en matière de déco : "Je vous préviens, les locaux ne sont pas de première jeunesse." Il m'a effectivement suffit d'une visite guidée à travers les deux étages du bâtiment pour être persuadée que je n'avais aucune chance de voir une équipe d'Intérieurs débouler pour filmer le carrelage terne et les PC démodés.

Côté ambiance, impossible de confondre avec la Défense. Pas de commercial en sueur qui court dans les couloirs, sa liste d'objectifs chimériques à la main ni de secrétaire prétentieuse qui toise la nouvelle et l'inscrit aussi sec dans sa liste d'ennemies à abattre ni même d'arrivistes aux dents acérées qui jonglent avec sadisme entre brimade et flagornerie.

Tout est étrangement calme. Mes nouveaux collègues sont doux, polis, souriants et non-violents.

A mon arrivée, j'ai été priée de m'installer au poste dit "vacant" où je n'ai pas mis quatre secondes pour capter que le mot n'était pas employé à tort. Les touches du téléphone sont couvertes d'une couche de poussière rébarbative et quelques moutons errent ça et là entre les tampons sales et les pots de crayons entourés d'élastiques en voie de décomposition avancée. Le papier à entête et les enveloppes nagent dans l'oubli, disposés sans aucun ordre dans une banette à la couleur incertaine. Des post-it délavés collés au disque dur témoignent qu'une quelconque auxiliaire a déjà souffert des lombaires sur cette chaise bleu dur qu'on ne peut décemment pas qualifier d'ergonomique.

Supporter une telle crasse au quotidien étant au-dessus de mes forces, ne serait-ce que pour vingt-trois jours, je réclame vite fait un chiffon à ma voisine qui, relativement désabusée, m'explique que la femme de ménage manque de temps pour faire son travail correctement. Armée de lingettes au doux nom de "Niceday", je me lance dans un réaménagement de l'espace alloué tout en me disant que si l'argent public est gaspillé quelque part, ce n'est certainement pas du côté entretien qu'il faut mener l'investigation.

Un saut à la cafétéria minuscule et dépourvue de fenêtre me conforte dans mon analyse. Le micro-ondes est repoussant, la cafetière maculée, la bouilloire encrassée et quand mon regard écoeuré tombe malencontreusement sur la hotte, je frôle l'apoplexie.

Mais comment font ces drôles d'hurluberlus pour naviguer dans une telle atmosphère sans qu'aucun d'entre eux n'ait succombé à l'envie pressante d'enfiler une paire de Mapa vert pomme ? D'un seul coup d'oeil, je mesure l'étendue des dégâts et le planning que je m'imposerais si j'avais à fréquenter l'endroit de manière récurrente. Mais comme je n'ai pas l'intention de camper là, je classe le projet en pensant que mes futurs-ex-collègues n'ont qu'à expédier un dossier à Valérie Damidot.

Mis à part ces anecdotes, tout est verrouillé à merveille. Dévoué, mon responsable consacre une partie de sa matinée à me dévoiler les mystères du monde du déchet et dès l'après-midi, je suis conviée à une réunion plus que fascinante dans le Saint des Saints.

Le crâne farci d'ordures ménagères et de déchets secs, je m'entraine à truffer ma prose de sigles-barbares-qui-font-pro, à espionner le camion poubelle,  à jauger le discours de l'administré qui veut à tout prix changer de bac et à assimiler toutes les subtilités d'un compostage dûment équilibré.

Bonne élève, me voilà finalement prête à accueillir l'usager perturbé, acharné, exalté voire emporté.

Ainsi se sera déroulé mon premier jour dans la FPT. Vendredi soir, j'aurai déjà décelé quelques fêlures dans ce petit monde apparemment lisse et insouciant. Une chose me paraîtra pourtant évidente. Quand on n'a pas à craindre d'être licencié pour un oui ou pour un non, on est forcément beaucoup plus détendu.

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8 septembre 2010

Nouveau rythme

Pas évident de remettre le pied à l'étrier mais bon an mal an, ça se déroule plutôt bien. L'homme assure dans son nouveau rôle de moitié-d'autorité-parentale-effective, Miss Cocotine se passe très bien de mes services et en trois jours, j'ai tout appris ou presque sur la gestion des déchets dans l'agglo. Encore 14 heures à tirer et je me charge de vous raconter cette semaine épique. Merci pour vos passages fidèles et vos com'.

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24 août 2010

Se jeter à l'eau

Hier matin 9h15. Sous une pluie diluvienne, je traverse tout Nantes pour finalement me pointer à mon rendez-vous, trempée jusqu'aux os et la frange en bataille. Décidément, je suis une good girl. S'extirper de mon cocon et braver les éléments pour quatre semaines dans l'univers captivant de la poubelle, c'est déjà un bel effort.

A 10 heures pile, j'arrive sur les lieux du crime. Un type souriant me serre la main et m'invite à monter dans son bureau.  Impossible de reculer, je suis faite comme un rat.

La conversation s'engage calmement et plus les mots défilent, plus je m'aperçois que loin des olibrius croisés ces derniers temps dans le privé, le gars qui m'observe est gentil et poli. C'est charmant et rassurant.

Quand il me questionne sur ma reconversion privé-public, j'ai bien envie de lui répondre : "Je n'y suis pour rien. c'est ma copine Chrystel qui m'a embarquée dans cette aventure invraisemblable. Moi, au fond, je ne désirais qu'une chose : continuer à exercer tranquillement mon métier de gestionnaire commerciale export dans le privé." mais je me retiens et lui mens comme un arracheur de dents. Tout passe comme une lettre à la poste.

Au moment où j'aborde sans véritable entrain le sujet fatal du salaire, j'apprends avec surprise que mon concours ne me sert à rien du tout, que je serai considérée comme un adjoint administratif de 2ème classe et que ce mois ne sera pas pris en compte dans la période de stage obligatoire d'un an. Le verdict tombe : c'est le SMIC et rien d'autre.

Mais en revanche, il m'assure que si je suis sage et disciplinée, il m'attribuera de jolies notes et fera remonter un dossier bien ficelé à la DRH qui, elle-même, me gardera bien au chaud dans ses petits papiers. La promesse d'un avenir rayonnant.

Au bout de 25 minutes d'entretien, mon interlocuteur se met tout à coup à conclure : "OK, pour moi, c'est bon. Je donne l'aval à la DRH et vous recevrez le contrat dans les jours qui viennent."

En deux temps trois mouvements, je me retrouve sur le pavé ruisselant partagée entre la jubilation d'être enfin embauchée après six ans de recherche et l'amertume d'avoir à encaisser le coup.

Un contrat d'un mois au SMIC.

La pilule a du mal à passer. En un clin d'oeil, toutes ces années à me battre pour un poste plus intéressant et un meilleur salaire s'envolent en fumée. Je viens juste d'accepter ce que je m'étais juré de refuser en arrivant dans le double four : une baisse de salaire de 30% par rapport à Bordeaux, où j'avais déjà dû me plier à 30% de moins qu'à Paris. Force est de constater que cinq ans après mon débarquement dans le nord-ouest, de guerre lasse, j'ai dû lâcher prise.

Traîner ainsi par monts et par vaux derrière l'homme et sa carrière professionnelle, je me doutais bien qu'un jour ou l'autre, j'aurais à le payer cher.

Je viens juste de prendre l'addition dans les dents. En une poignée de secondes, les quelques barreaux escaladés à la sueur de mon front depuis 1981 se sont brusquement dérobés sous mes pieds, me propulsant direct au bas de l'échelle, hagarde et les fesses bleues. Comme une débutante, j'en suis réduite à devoir faire mes preuves.

Pour autant, ce n'est pas le moment de flancher. Je me suis laissée enrôlée quasiment de force dans l'aventure. Maintenant il faut assumer.

Et assumer, dans l'instant, c'est au-dessus de mes forces car une vague de culpabilité vient juste de me submerger.

Mais que va devenir Miss Cocotine si je quitte le domicile du lundi au vendredi de 7h30 à 17h30 ?

Là, je repense à cette FAF qui, heureuse de sa condition, avait écrit sur un forum quelconque :

"Je ne vois pas comment je pourrais travailler. Je n'ai pas le temps !"

A l'époque, la pertinence de cette remarque m'avait fait hurler de rire. Aujourd'hui, les deux journées en 24h, clairement, je ne suis pas plus prête qu'elle à les affronter.

L'oeil vif et les joues enflammées, je me dis soudain que l'heure a sonné de frapper à la porte de l'autre moitié d'autorité parentale. Je dégaine mon portable :

- C'est moi. Je suis embauchée.

- Félicitations.

- On se voit ce soir pour savoir comment on s'organise pour la petite ?

- D'accord.

L'homme, qui quitte régulièrement le domicile de 7h30 à 19h30, n'en est sûrement pas conscient mais sa vie va changer. Il va apprendre qu'un enfant de 6 ans va chancelant à l'école à 8h50 et en ressort affamé à 16h30, que le réfrigérateur ne regorge pas de douceurs sur un coup de baguette magique, que la poussière reste collée si un chiffon ne l'étouffe pas et que les petits plats crétois de Koula se transforment en prêt-à-servir-Picard si personne ne campe en cuisine pendant 2h30.

Somme toute, ça va remettre les pendules à l'heure, que la MAF réinvestisse le monde du travail.

Et puis, après tout, la gestion des déchets, c'est top tendance !

Mardi midi :

Hier soir, l'homme, a promis d'amener Miss Cocotine au périscolaire tous les matins en déclarant, fanfaron : "Bah, c'est que pour 4 semaines."

24 juin 2010

ADMISE !

JE SUIS DANS LA LISTE !

NOM D'UN CHIEN,

JE N'Y CROIS PAS !

APPAREMMENT, JE LEUR AI PLU...

MILLE FOIS MERCI

A CEUX QUI M'ONT SOUTENUE SI GENTIMENT !

CHRYSTEL, MERCI,

C'EST TOI QUI M'A POUSSEE A M'INSCRIRE.

CECILE, MERCI,

C'EST TOI QUI M'A POUSSEE A REVISER.

FOUTU KARMA...

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Illustration Gil Elvgren

22 juin 2010

Chronique d'un concours ordinaire, épisode number 3

A la suite du deuxième épisode...

En me réveillant ce lundi 21 juin 2010, j'étais consciente que l'après-midi même à 14h45, mon destin serait scellé. Est-ce-que j'allais enfin devenir "La Nouvelle Star de la FPT des PDL*" ? Est-ce-que je pourrais enfin rêver de signer ce contrat qui me permettrait d'être en haut de l'affiche des smicards ?

Le suspens était à son comble.

La veille, l'homme, dans un élan de bravoure, m'avait fait réciter mes gammes brièvement avant de conclure d'un hâtif : "Moi, j'te l'dis, c'est dans la poche. J'ai confiance." qui me laissa penser qu'il me flattait l'ego pour écourter la séance et ne pas avoir à se pencher trop longuement sur la définition d'un EPCI ou les méandres des services de la région.

Bercée par les t'as-rien-à-perdre des uns et des autres, accentuant mon sentiment d'être vraiment une pauvre-loque-scotchée-au-fond-d'un-gouffre, je m'astreignis à dégoter autre chose que des Converse tout en révisant les modes de scrutins des municipales-cantonales-régionales. Raisonnablement pomponnée et correctement sustentée, je jugeai bon de prévoir une bonne heure pour parcourir les 9 km qui me séparaient du Greta de Nantes, une annexe de Baltard, en quelque sorte, mais affublée d'une déco nettement moins pimpante.

A vrai dire, l'attente fut bien plus longue que les festivités. A 14 heures pile, je fus appelée avec sept autres candidates pour l'épreuve de bureautique et embarquée dans une salle où deux examinateurs nous attendaient de pied ferme.

Une fois assise devant le PC, tout s'est étrangement accéléré et les quinze minutes qui ont suivi ont valu leur pesant de cacahuètes. Au top chrono, j'ai plongé dans un flou vertigineux d'où j'ai peiné à sortir pour enfin capter ce qu'on attendait de moi. Il s'agissait de mettre un petit tableau Excel en forme, de calculer une somme, quatre pourcentages, d'en tirer un graphique, de nommer les feuilles, et d'insérer le tout avec liaisons dans un document Word. Eh bien, vous le croirez ou non. La fille qui se prévaut de pactiser avec l'informatique depuis 81, du temps où tout apparaissait en vert sur fond noir et où le DOS était roi, a misérablement bloqué sur "avec liaison".

A cet instant, j'ai compris que c'était écrit. "burden" et "avec liaison" étaient destinés à me pourrir mon mois de juin 2010.

Consciente que le temps imparti était un peu court pour enquêter sur cette satanée liaison, j'ai décidé, la mort dans l'âme, de me lancer dans un copier-coller simple et j'ai rendu mon compte-rendu Word bien propre, sur une page, mais sans avoir respecté les consignes, ce qui, à n'en pas douter, allait me priver d'un certain nombre de points.

A voir les mines déconfites de mes concurrentes, je n'étais sûrement pas la seule à songer que ma note ne serait pas à la hauteur des millions d'heures consacrées à l'exploration du package Microsoft et à pester contre l'injustice de l'exercice.

Mais pas le temps de s'appesantir sur son sort car dans le bâtiment d'en face, les jurys nous attendaient pour le fameux entretien oral.

C'est comme ça que je me suis retrouvée à frapper à la porte numéro 5 pour m'asseoir face à un homme et une femme qui allaient me persécuter pendant un nouveau quart d'heure, minuteur Terraillon en main. Loin de m'interroger sur mon parcours et mes motivations, ils me bombardèrent de questions parfois très pointues sur la fonction publique et même si je réussis à répondre honorablement à moult pièges, je dus aussi m'avouer vaincue à plusieurs reprises et lâcher des non-là-je -suis-désolée-mais-je-ne-vois-pas.

Criblée de flèches au moment où le chrono me délivra enfin, j'entendis l'un d'eux s'excuser gentiment : "Votre supplice est terminé. On vous a assommée de questions." Ce à quoi, en bonne fayotte, je répondis très poliment : "Mais non, pas du tout. Vous êtes là pour ça." avant de recevoir un définitif et opaque : "On fait ça pour voir jusqu'où on peut aller. C'est bon, on a vu." qui me laissa perplexe mais ne m'empêcha pas de saluer respectueusement mes bourreaux avant de tourner les talons.

A la sortie, j'échangeai quelques mots avec deux autres candidates qui étaient à peu près aussi décomposées que je l'étais.

Une fois seule, je dégainai mon portable et l'homme reçut un "J'ai foiré les deux épreuves." qu'il ponctua d'un "Ah bon ?" intrigué et déçu qui me fit prendre conscience de tous les espoirs qu'il avait placés en moi.

Ma mauvaise humeur me colla aux basques jusqu'au soir très tard, en dépit des efforts déployés par ma copine Odile qui m'assura qu'en sortant d'un oral de BTS, elle s'était, elle aussi, trouvée pitoyable et que contre toute attente, elle avait eu une bonne note.

Après une nuit de sommeil, j'en vins à me dire que si conclusion il devait y avoir à ce nouvel épisode ébouriffant de ma vie de chercheuse d'emploi, ce serait :

Un quart d'heure, fichtre de fichtre, C'EST COURT... ET C'EST LONG...

Résultat de ma tentative de résinsertion professionnelle, mais côté fonction publique, le jeudi 24 juin à 17 heures.

* Pour les novices, FPT : Fonction Publique Territoriale, PDL : Pays De Loire

16 juin 2010

Chronique d'un concours ordinaire, épisode number 2

A la suite du premier épisode...

Ce matin, il fallait décaniller tôt en priant tous les Dieux de l'univers que Miss Cocotine ne soit pas tentée de me péter une petite crise de nerfs dont elle seule a le secret, tout ça parce que je n'ai pas mis le numéro un-zéro du CD Pirouettes-Cacahouètes ou que je n'ai pas écouté pieusement son interminable histoire d'Alexandra qui tire la couette de Manon.

C'est qu'en ce mercredi 16 juin 2010, il valait mieux ne compter que sur moi-même pour superviser, une fois encore, le parcours du combattant que représentent l'ingurgitation de trois céréales et deux bouts de bananes plus un verre de lait à la paille, trois minutes de brossage-comme-Maman-et-surtout-pas-comme-Papa, la mise en place du bandeau Kitty pour nettoyage de peau digne des plus grands instituts avec force "Miroir, mon beau miroir...", une toilette au gant ah-oui-fallait-le-mouiller-avant, le saut laborieux dans la culotte Snoopy suivi de près ou pas de celui dans le pantacourt, un effort titanesque pour enfiler un pauvre tee-shirt et un passage au salon pour démêler les noeuds et se retrouver avec la plus débridée des chouquettes sur le haut du crâne.

Oui, il valait mieux assumer en passant sous silence cette impression bizarre de traverser, une fois encore, un grand moment de solitude.

L'homme avait manifestement d'autres chats à fouetter que de prendre le relai pour me permettre de souffler un peu. A 7 heures pétantes, sa petite Samsonite bouclée, il fit ses adieux à la compagnie et partit le nez au vent, tel un héros, pour attraper son Airbus à Nantes-Atlantique.

Mon karma, à moi, était nettement moins excitant.

A 9h15, j'étais dûment convoquée par le Conseil Général du double four pour démontrer tout mon savoir-faire en matière de version, le but étant de grappiller des points, sachant que seuls ceux au-dessus de 10 seraient pris en compte. Il s'agissait donc de briller franchement et de viser sans complexe le 19 ou le 20 en anglais.

Depuis trois jours, j'avais soigneusement briefé Miss Cocotine. Pas question de prendre le chou à Maman mercredi matin sous peine de la voir se transformer en monstre-comme-il-n'en-existe-même-pas-dans-les-Pomme-d'Api-et-Youpi-les-plus-terrifiants. Faut croire que mon pouvoir de persuasion a été à la hauteur. La minette s'est réveillée comme un lapin qui sort d'un chapeau, a battu la grande aiguille et s'est lavée et habillée en moins de deux.

Le trésor confié au centre de loisirs à 7h58, j'ai réussi à passer sud-Loire et à atteindre La Troc' sans encombre. Encore une salle de spectacle dont je ne soupçonnais même pas l'existence. De plus anxieux que moi étaient déjà là, assis sur les marches, dans l'attente du lever de rideau. Je suis restée dans ma décapotable à écouter distraitement le duo Paillé-Touraine s'étriper au sujet de la réforme des retraites tout en aspergeant ma langue de Rescue.

A 9h15 pile, j'ai suivi la petite troupe aux mines concentrées qui s'était formée peu à peu dans le hall et je me suis installée à ma table étiquetée sans davantage d'émoi. La salle, de taille M par rapport à celle de La Beaujoire, ne m'impressionna même pas. Je me sentais en passe de devenir une vraie bête à concours tout en étant consciente que courir après cette nouvelle vocation juste au moment où les cotisations des fonctionnaires allaient augmenter, ce n'était quand même pas très futé.

Mon petit triangle rempli et collé d'un geste vengeur qui signifiait ceux-là-au-moins-ils-ne-me-balanceront-pas-parce-que-j'ai-46-ans, j'ai sagement attendu le sujet. Lorsque la gentille organisatrice a donné son feu vert, je l'ai retourné et l'un de mes sourcils est resté figé en l'air pendant que j'éclatais de rire intérieurement :

Nicolas Sarkozy to introduce French pension reforms

Du grand art. On pouvait difficilement mieux coller à l'actualité, notre cher Ministre du Travail étant sur le point de déballer le plan d'attaque du gouvernement en matière de retraite.

14 lignes ne m'ont posé aucun problème mais la 15ème m'a obligé à rendre un morceau de vide et m'avouer ainsi vaincue. Tout ça à cause du mot "burden" que je n'avais jamais rencontré de ma vie et cette foutue phrase "His government wants to cut the pension burden ont he state" qui m'a laissé sans encre.

Je suis sortie de mon heure de réflexion intense de fort mauvaise humeur. Pour le 19 ou le 20, c'était cuit. Burden, burden, what doest it mean ? Burden, burden, fucking burden...

Du coup, un instant de folie. J'ai déboulé chez H&M à Beaulieu où j'ai essayé la moitié du rayon femme, histoire d'oublier this so stupid "burden".

Après avoir passé mes nerfs dans quatre cabines d'essayage, j'ai changé de magasin sans me rendre compte que je mettais manifestement la barre trop haut.

Des maillots de bain, je me suis toquée d'essayer des maillots de bain. Pour la première fois de la saison printemps-été 2010, en plus. Fallait vraiment que je sois au bout du rouleau.

Vous imaginez l'erreur ?

Ca m'a calmée direct.

J'ai tout reposé et je suis rentrée à la maison pour vérifier le mot "burden" dans mon Harrap's.

Burden, ça veut dire fardeau...

Là, j'ai pouffé. Si le burden du gouvernement, c'est la retraite, le mien, c'est bien la recherche d'emploi .

Fucking burden !

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